Croqueurs d'audience | Sous les traits de la justice

30 mars au 29 mai 2011

L’exposition

La loi du dessin

En Suisse, à l’instar d’autres législations européennes, les photographes et autres preneurs d’images ou son, sont interdits des salles d’audience. Du fait que les procès sont généralement publics, la justice entend ainsi protéger la personnalité et la présomption d’innocence des accusés. Une protection qui s’étend à tous les protagonistes et qui assure l’ordre et la sérénité des débats. Comme le dessin d’audience est considéré par la loi comme une interprétation subjective de la réalité, la presse fait donc appel à des dessinateurs pour représenter le déroulement des affaires judiciaires.

Profession: croqueur d’audience

Le croquis d’audience est ainsi une manière de détourner l’interdiction tout en illustrant les histoires des procès qui font l’actualité. Sur l’arc lémanique, ils sont trois à se partager les pages des quotidiens romands. Cecilia Bozzoli collabore pour Le Temps, Gilles-Emmanuel Fiaux pour 24 Heures ou Le Matin et Patrick Tondeux publie dans la Tribune de Genève. Un métier à temps partiel qu’ils exercent sur appel depuis quelques années.

Une comédie humaine

L’exposition accrochée à Morges rend compte des procès qui ont marqué l’actualité tout en questionnant le microcosme singulier de l’univers juridique. Accusés, témoins, victimes, avocats ou magistrats, ils se partagent le temps d’une procédure la scène du tribunal sur laquelle délits et autres crimes vont être jugés. Sous les traits de la justice, les dessins d’audience captent une réalité cachée. Ils exhibent les protagonistes inconnus d’un fait divers qui le plus souvent finit dans l’oubli. Pourtant, des affaires célèbres demeurent présentes dans la mémoire collective. Elles laissent leur trace et interrogent le fonctionnement de la machine judiciaire et, par répercussion, de notre société.

Biographie

Cecilia Bozzoli

Son nom dévoile ses origines, tout comme une légère intonation chantante dans la voix. Cecilia Bozzoli est née en 1957 à Gênes, en Italie, dans un environnement artisan et artistique : entre un aïeul sculpteur sur bois et un père ébéniste, peintre et fumettista. La vocation du trait semble héréditaire chez les Bozzoli. A douze ans, elle quitte sa terre natale pour Lausanne, où elle obtient une licence en sociologie. Mais l’attrait du dessin la pousse à se lancer dans l’illustration. Au fil des ans, cette autodidacte se forme à diverses techniques graphiques (BD historique, peinture à l’huile, dessin hyperréaliste…). C’est grâce au dessin de presse que Cecilia Bozzoli aboutit au croquis d’audience. Une demande d’une chroniqueuse judiciaire et elle se retrouve assise dans un prétoire, un bloc en mains, concentrée à immortaliser le moindre mouvement de l’affaire Dorsaz. C’était en 1998. Depuis, elle dessine régulièrement pour le quotidien Le Temps où, de son trait vif et précis, elle croque les gens de justice. Ses dessins ont aussi été montrés dans des émissions télévisuelles.

Gilles-Emmanuel Fiaux

Il signe GEF, qu’il prononce à la française. Né en 1974, ce veveysan de naissance se passionne dès son jeune âge pour le dessin et la BD. Une vocation qui le mène à suivre la formation en arts plastiques de l’Ecole Emile Cohl de Lyon. Son diplôme en poche, il démarche dès 1996 les magazines et les éditeurs en quête d’illustrateurs. Présent à Morges pour dessiner la construction de la galère « la Liberté », il développe un intérêt particulier pour le croquis d’observation. « J’aime croquer, c’est un travail sur le vif qui nourrit le travail en atelier. » Cette expérience le conduit à proposer son coup de crayon aux rédactions. Le journal 24 Heures l’engage dès 2003 comme dessinateur de procès. Sa première affaire se déroule à Nyon, l’histoire « d’un Kosovar qui avait tué sa femme et l’avait enterrée dans le jardin. » Une première expérience qui l’impressionne, mais ne l’arrête pas. Dès lors, il arpente les différentes salles d’audience, mandaté par le quotidien lausannois ou le journal Le Matin. Ses croquis sont également filmés pour la télévision.

Patrick Tondeux

Il arbore une allure de marin et affiche un tracé fin et aérien. Des qualités que le dessinateur présente dès le premier coup de pinceau. Ses origines niçoises y sont peut-être pour quelque chose ! Né en 1949, Patrick Tondeux quitte sept ans plus tard la Côte d’Azur pour Genève. Il entame par la suite des études de graphiste, un métier qu’il exerce toujours comme indépendant. Avec une consœur, il fonde sa propre agence de graphisme « Kohler & Tondeux ». Grâce à une rencontre avec le journaliste Claude Monnier dans le courant des années 1980, il prend en charge la direction artistique du Temps stratégique. Dès 2004, il illustre régulièrement les comptes rendus de procès pour la Tribune de Genève ou la Télévision suisse romande. Une collaboration qui l’a amené à se réapproprier l’univers judiciaire. « Quand les procès durent plusieurs jours, j’ai le sentiment d’appartenir à une troupe de théâtre. » Un microcosme aquarellé qu’il a exposé au Palais de justice de Genève fin 2010.

Illustrations

Remerciements

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